Le chômage au Canada avant 1929

Au début du 20e siècle, le chômage saisonnier était une caractéristique du marché du travail et représentait une des causes principales de la pauvreté.

En 1918, le gouvernement fédéral adopte une loi pour la création d’un réseau national de bureaux publics de placement. À cette même époque, des syndicats commencent à revendiquer un régime d’assurance-chômage canadien. Le gouvernement leur répond alors que c’est l’économie de marché qui finira par résorber le problème du chômage. Il faut laisser le marché fonctionner sans entraves !
Ce sont les villes qui portent secours aux chômeurs. Le gouvernement fédéral se contente de créer le « Patriotic Fund » qui dédommage les sans-emploi qui ont contribué à l’effort de guerre et il accepte de défrayer le tiers des coûts encourus par les villes pour aider les personnes en chômage.

histoire de l'assurance-emploi

1929-1939 : La Grande Dépression

En 1929, au moment où la crise économique frappe, l’État et le patronat considèrent toujours que l’individu est responsable de sa condition de chômage. On fait alors reposer les conséquences du chômage sur les épaules des sans-travail et de leurs familles. En 1932-1933, au plus fort de la dépression, on compte 800 000 sans-emploi au Canada. Le taux de chômage atteint alors 27%. À Montréal, la ville canadienne la plus durement touchée par la crise, on retrouve 60 000 sans-travail. En tenant compte des personnes dépendantes, c’est près de 250 000 Montréalais et Montréalaises qui ont recours aux mesures de secours, soit plus ou moins le tiers de la population. Cette situation entraîne une plus grande exploitation pour les ouvriers non spécialisés, les femmes, les jeunes et la main-d’œuvre d’origine immigrante.
L’État sent la soupe chaude. Les gouvernements mettent en place des mesures temporaires d’aide aux sans-emploi en privilégiant les secours directs (les programmes de travaux publics). Mais la crise économique persiste : de plus en plus de sans-emploi parcourent le pays à la recherche de travail et l’État craint l’agitation politique. Pour lutter contre cette situation, des organisations de chômeurs et de chômeuses sont mises sur pied un peu partout au pays. Plusieurs villes deviennent la scène de manifestations de sans-travail.

À Montréal, la classe ouvrière se mobilise lors de nombreuses manifestations. De plus, elle résiste aux évictions, fait la grève sur les chantiers de travaux publics, se mobilise contre les mauvaises conditions dans les refuges, refuse de payer les factures de gaz, d’eau et d’électricité. L’État répond alors par la répression. Les arrestations, procès, déportations et incarcérations se comptent par centaines. Pour la bourgeoisie, l’Église catholique et les différents paliers gouvernementaux, tout acte de révolte de la part des sans-emploi est perçu comme étant le fruit de l’agitation communiste et fomentée par des éléments étrangers. La grande majorité des rassemblements et des manifestations sont dispersés violemment par la police.

En 1933, le gouvernement fédéral crée le programme de camps de travail. Ce dernier vise les jeunes hommes célibataires, sans-emploi et sans-logis. Les camps sont alors placés sous la responsabilité du ministère de la Défense. Les sans-travail qui refusent de s’enrôler dans ces camps se voient refuser toute aide subséquente. Au total, plus de 20 000 jeunes chômeurs canadiens passent par cette institution, dont 1 900 à Valcartier dans la région de Québec. Les conditions de travail sont atroces et les hommes ont droit à un revenu de 0,20$ par jour.

La situation s’enflamme en 1935. Les hommes entassés dans les camps de travail de Colombie-Britannique déclenchent la grève. En mai 1935, les grévistes et leurs alliés entreprennent une grande marche vers Ottawa. Le gouvernement Bennett n’a aucunement l’intention d’accueillir les marcheurs dans la capitale. La Gendarmerie royale du Canada (GRC) intervient le 1er juillet à Régina et les dirigeants du mouvement sont arrêtés. Après les événements de Saskatchewan, quatre autres marches se mettent en branle à partir de Winnipeg, du nord et du sud de l’Ontario et de Montréal. Dans la métropole, les autorités font tout pour empêcher le départ de la marche. Huit cents policiers sont mobilisés et un «cordon sanitaire» est dressé autour de Montréal et de ses banlieues. Les rassemblements sont interdits partout en ville, même dans les parcs et les terrains de jeux, et ce, pour l’ensemble de l’été. Quelques centaines de marcheurs sont par la suite arrêtés et traduits en justice.

La stratégie de répression envers les sans-emploi d’un côté et la promesse d’un régime d’assurance-chômage de l’autre (influencée en partie par le New Deal américain) font perdre le pouvoir aux conservateurs lors des élections. En juin 1940, le gouvernement libéral de Mackenzie King, en accord avec les provinces, fait une demande de modification de la constitution à la Grande-Bretagne afin d’avoir la compétence en matière d’assurance-chômage. Le 12 juillet, la modification est acceptée par le Parlement britannique. La loi est finalement sanctionnée le 7 août 1940 par le gouvernement canadien. À l’époque, 42% de la population active est admissible au nouveau régime d’assurance-chômage.

1940 à 1975 : Montée de l’interventionnisme de l’État en matière de chômage

La Loi de 1940 sur l’assurance-chômage est, en bonne partie, calquée sur le régime de la Grande-Bretagne instauré en 1911. À l’époque, les prestations octroyées n’assurent pas la couverture des besoins de base des personnes. Le niveau d’admissibilité est limité puisqu’un bon nombre d’emplois exercés sur une base saisonnière (pêche, agriculture et exploitation forestière) ne sont pas couverts par le régime.

Entre 1940 et 1975, le régime d’assurance-chômage prendra de l’expansion. Il y aura deux réformes majeures au régime. La première, celle de 1955, vient améliorer la couverture des emplois saisonniers et elle inclut d’autres catégories de cotisants et de cotisantes. Soixante-quinze pour cent de la population active est couverte par le régime.

La seconde réforme, basée sur le livre blanc de Bryce Mackasey, met en place la loi de 1971 sur l’assurance-chômage. Cette loi situe le rôle de l’assurance-chômage dans un contexte social et économique global. Le régime est alors universalisé, il s’adresse à 96 % de la population active. Le nombre de semaines de travail exigé pour être admissible est de huit semaines au cours des 52 dernières semaines et le taux des prestations est augmenté de manière significative, c’est-à-dire à 66 % des gains assurables et à 75% pour les prestataires qui ont une ou des personnes à charge. Des prestations spéciales apparaissent (maladie, maternité), mais elles sont accessibles seulement aux personnes ayant travaillé plus de 20 semaines. Les sanctions pour départ volontaire, congédiement pour inconduite et pour refus d’un emploi convenable se traduisent par une perte maximale de trois semaines de prestations. Le délai de carence passe de cinq jours à deux semaines.

1975 à 1988 : Remise en question de l’interventionnisme de l’État en matière de chômage

histoire assurance-chomage
Les acteurs de l’économie mondiale remettent en question l’interventionnisme des États dans tous les secteurs, notamment en matière de chômage. Ce qu’on appelle aujourd’hui le néolibéralisme, qui est en fait le retour d’un capitalisme extrême, étend ses tentacules et accapare le discours dominant. On commence à suggérer que les chômeurs et chômeuses sont responsables de leur situation ! On déplace la responsabilité du chômage sur les victimes.
TROIS VAGUES DE RÉFORMES RÉDUIRONT L’ACCESSIBILITÉ AU RÉGIME

En 1975, le projet de loi C-69 abolit le taux de prestations à 75 % pour les chômeurs ayant des personnes à charge. Pour les départs volontaires et l’inconduite, la durée maximale de l’exclusion double pour atteindre six semaines.

En 1977, le projet de loi C-27 instaure la norme variable d’admissibilité. Désormais, le nombre de semaines de travail requis pour être admissible aux prestations variera selon le taux de chômage régional. On crée aussi des mesures actives d’emploi à même le régime d’assurance- chômage (formation professionnelle et nouveaux programmes de sauvegarde ou de création d’emplois). C’est à ce moment que l’État commence à utiliser l’argent de la caisse à d’autres fins qu’à l’indemnisation pour la perte d’un emploi. Le détournement de la caisse ne date pas d’hier.

En 1978, le projet de loi C-14 resserre les critères d’admissibilité : il faudra dorénavant accumuler plus de semaines de travail pour se qualifier. Le taux de prestations est diminué à 60 %.
C’est autour de ces années que plusieurs groupes de défense des droits des chômeurs et des chômeuses font leur apparition au Québec. Leurs interventions étaient particulièrement basées sur l’action politique directe.

De 1980 à 1988, il y a peu de modifications au régime d’assurance-chômage. Plusieurs rapports sur le régime ont été produits durant cette période. Ils préconisent le désengagement de l’État, soit un régime plus flexible et concurrentiel afin de s’adapter au nouveau contexte du libre-échange. Ces rapports, qui ont fait l’objet d’opposition des mouvements syndical et populaire, se sont retrouvés sur les tablettes.

1988 à 2006 : Le début de la fin… la domination du libre-échange et du néolibéralisme

À la suite des élections de 1988, avec à l’horizon l’Accord de libre-échange (ALE), l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) et à l’invitation de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), le Canada modifie ses programmes sociaux.

En 1990, le gouvernement sabre fortement dans le régime d’assurance-chômage. La réforme C-21 augmente l’exclusion des travailleurs et des travailleuses et accentue le caractère répressif de la loi. Le Congrès du travail du Canada (CTC) évalue, à cette époque, que 130 000 sans-emploi ne seront plus admissibles aux prestations, dont 44 000 au Québec. Par ailleurs, l’État se retire complètement du financement de la caisse (son financement avait toujours été tripartite: État, personnes salariées, employeurs). Cette réforme, tellement contestée et dévastatrice, fut bloquée au Sénat pendant plusieurs mois, mais fut finalement adoptée en octobre 1990.

Dès 1993, le gouvernement conservateur lance une nouvelle réforme, le projet de loi C-113. Une fois de plus, on coupe! Le taux de prestations passe de 60% à 57% de la moyenne salariale. Ce projet de loi fait aussi et surtout en sorte que les personnes perdent désormais le droit aux prestations régulières à la suite d’un départ volontaire «non justifié» ou d’un congédiement pour «inconduite». C’est à la liberté de travail même que l’on s’attaque.

En 1994, les libéraux prennent le pouvoir. Malgré leur opposition aux précédentes réformes des conservateurs, ils sabrent encore dans le régime d’assurance-chômage avec le projet C-17. Les prestataires subissent une perte de 9 à 16 semaines de prestations selon la région et le taux de prestations passe de 57% à 55%. De cette manière, le gouvernement entend diminuer le déficit de la caisse (six milliards de dollars). Rappelons que ce déficit a été créé par le retrait du financement de l’État à la caisse de l’assurance-chômage et par les coûts des nouvelles mesures actives. L’orientation «pro-marché» du Canada apparaît de plus en plus évidente.

En 1996, les libéraux décident qu’il faut abolir le chômage (au moins au niveau du langage) et concluent qu’il faut d’abord éliminer les chômeurs et les chômeuses. Ils s’attaquent, avec le projet de loi C-12, à ceux et celles dont la position est la plus vulnérable sur le marché du travail (emplois précaires: temps partiel, sur appel, saisonniers, etc.). C’est l’instauration de mesures comme le «dénominateur» et la «période de base», dont la conséquence sur le montant de prestations est de pénaliser financièrement les prestataires. De plus, en considérant les heures de travail plutôt que les semaines pour se qualifier aux prestations de chômage, l’État exige plus du double de temps de travail pour être admissible. Les effets de cette réforme n’ont pas tardé à se faire sentir… Malgré l’arrivée de 500 000 nouveaux cotisants et cotisantes à la caisse, la couverture du régime (alors à 80%) tombe de moitié (environ 40%) et la caisse d’assurance-chômage libère des surplus que le gouvernement va détourner.

Pour l’État, le régime d’assurance-chômage devient une véritable mine d’or qu’il va piller sans ménagement au détriment des travailleurs et des travailleuses. S’il fait parfois des promesses, c’est pour mieux ne rien faire et ne rien régler des véritables problèmes que sont:

  • les critères d’admissibilité trop élevés;
  • la durée des prestations trop courte;
  • la façon dont les prestations sont calculées;
  • le faible taux de prestations accordé;
  • les exclusions.

Ces réformes opérées dans les années 1990 dans le régime d’assurance-chômage ont heurté de plein fouet les chômeurs et les chômeuses. Elles ont également eu des effets importants sur l’ensemble du marché du travail en exerçant une pression à la baisse sur les salaires et les conditions de travail. Voilà donc un des héritages de l’application des politiques découlant de l’offensive capitaliste. 

Le détournement de la caisse d’assurance-chômage

Lors de la création du régime d’assurance-chômage canadien en 1940, la caisse est financée par les cotisations des travailleurs et des travailleuses, des employeurs et par l’État à parts égales. De plus, le gouvernement donne une somme supplémentaire équivalente à 20% du total des cotisations des employé.e.s et des employeurs en plus d’assumer les coûts de fonctionnement du régime. La caisse d’assurance-chômage est un compte spécifique à même les revenus généraux du Trésor (Fonds du revenu consolidé). Dans la loi sur l’assurance-chômage, il est spécifié que la caisse doit servir au versement de prestations et que les sommes ne peuvent pas être utilisées à d’autres fins.

Avec le projet de loi C-21 (1990), le gouvernement conservateur décide de se retirer du financement de la caisse d’assurance-chômage. Fait à noter, ce parti avait promis, lors de la campagne électorale de 1988, de ne pas toucher aux programmes sociaux. Après la victoire, il lance sa « Stratégie de mise en valeur de la main-d’œuvre canadienne », qui prévoit utiliser le régime d’assurance-chômage à des fins actives. C’est sur le dos des chômeurs et des chômeuses que seront financés les programmes de formation et d’adaptation au libre-échange.

En 1993, la caisse est en déficit et le gouvernement fait de nouvelles réductions de dépenses dans le régime (projet de loi C-113). Le déficit, qui est causé par le retrait de l’État du financement de la caisse, servira d’argument pour justifier les nouvelles coupures. Les libéraux qui sont alors dans l’opposition contestent les modifications au régime, tout comme ils s’opposent à l’ALÉNA (adoptée le 27 mai 1993) et à la taxe sur les produits et services (TPS). Lorsqu’ils sont portés au pouvoir, ils présentent une nouvelle vague de compressions à l’assurance-chômage (projet de loi C-17) et conservent la TPS. La caisse d’assurance-chômage a commencé à produire des surplus et le détournement de l’argent des chômeurs et des chômeuses s’est accentué.

À partir de 1996, les surplus ne cesseront de s’accumuler pour frôler les 60 milliards en 2009. Cet argent a été siphonné de la caisse d’assurance-chômage, donc de nos poches. Afin de faire miraculeusement disparaître le surplus, le gouvernement fédéral crée au printemps 2008 l’Office de financement de l’assurance-emploi.

Malgré un recours devant les tribunaux entrepris par deux syndicats en 1996, la Cour suprême du Canada a néanmoins jugé, à l’automne 2008, que le gouvernement pouvait user de ces sommes comme bon lui semble. C’est donc dire que la lutte au déficit et à la dette s’est faite principalement à partir des contributions des travailleurs et des travailleuses d’un océan à l’autre.

Un renversement complet

Les modifications apportées dans le régime par les conservateurs et les libéraux ont réduit la protection des personnes salariées contre le risque de chômage. Bien que le régime ait été mis sur pied spécifiquement pour dédommager les travailleurs et les travailleuses qui perdent leur emploi, le gouvernement, voyant dans la caisse d’assurance-chômage une «poule aux œufs d’or», a adapté le régime aux exigences du capitalisme sauvage et du libre-marché. Son discours est que le chômage relève de la responsabilité de l’individu et non de l’État!

Bref, dans cette optique, on soumet totalement les travailleurs et les travailleuses aux impératifs de productivité, de compétitivité et de course aux profits. Le résultat est que bon nombre de personnes qui ne sont pas admissibles à l’assurance-chômage se retrouvent soit bénéficiaires de l’assistance sociale, soit dépendants de leur conjoint, de leur famille, ou alors vident leurs comptes en banque, quand ce n’est pas les économies d’une vie entière dont une partie était mise de côté pour la retraite.

Dans la vraie vie, non pas dans les fantasmes, promesses, visions et élucubrations des barbares capitalistes, plusieurs citoyens et citoyennes travaillent à rabais, dans des conditions de plus en plus difficiles, de peur de se retrouver avec rien. Non seulement on est loin d’une société où s’épanouir devrait être la règle, mais le résultat est souvent une détérioration de la santé, tant au niveau mental que physique, une perte de confiance, un repli sur soi, un isolement…

Les réformes des années 1990 jumelées aux baissessubséquentes du taux de cotisation permettront bientôt à l’État de nous dire qu’il est impossible de bonifier le régime. S’il y a une barrière à la bonification du régime, elle n’est pas économique mais bien politique. L’État a complètement dénaturé l’objet initial du régime d’assurance-chômage. Cette dénaturation n’a pas été imposée par la situation économique, elle a été prescrite par les décideurs du marché mondial pour qui le bien-être des peuples est le dernier des soucis. Seule compte la maximisation des profits. Ça, c’est le capitalisme. ¹

Les années Harper : le dernier saccage

Dans un premier temps, après avoir remplacé les libéraux en 2006, les conservateurs de monsieur Harper ont peu touché au régime d’assurance-chômage – du moins à ce qu’il en restait. Ils se sont contentés de prolonger, modifier ou introduire certains projets pilotes ou mesures temporaires adaptés à la conjoncture. Dans certains cas, on peut parler de clientélisme, voire de discrimination entre travailleurs et travailleuses (ceux et celles qui ont rarement touché du chômage versus ceux et celles qui y ont recours plus fréquemment). Rien de tel pour aller chercher, dans des régions cibles, des votes pour la prochaine élection…

Parallèlement, le gouvernement Harper a entrepris d’importants changements au niveau administratif, en imposant le « tout à l’Internet ». Il est en effet de plus en plus difficile, pour un prestataire, de parler à un être humain. La réorganisation des services et l’abolition de centaines de postes de fonctionnaires à Service Canada ont contribué à créer l’une des pires crises que l’on ait connues à l’automne 2011 et l’hiver 2012; il n’est pas rare que des gens ayant perdu leur emploi aient eu à attendre jusqu’à trois, parfois même cinq mois avant d’avoir une simple réponse à leur demande initiale de prestations. C’est comme si le gouvernement voulait que les gens finissent par être tellement écœurés qu’ils se détournent du régime d’assurance-chômage.

C’est au printemps 2012, dans la foulée du budget présenté par le ministre des Finances Jim Flaherty, que la ministre Diane Finley a présenté son plan de saccage du régime d’assurance-chômage. En vertu de cette réforme, chaque prestataire est désormais tenu de chercher activement et d’accepter un emploi à des conditions moindres que son emploi habituel, à un salaire pouvant aller jusqu’à 70 % de sa rémunération antérieure et dans un domaine n’ayant dans bien des cas rien à voir avec son expérience et sa formation. Dorénavant, le droit à l’assurance-chômage ne dépend plus uniquement des antécédents de travail d’un salarié, mais aussi de son historique d’utilisation du régime. Les « prestataires fréquents » (travailleurs et travailleuses dont l’emploi est saisonnier ou à statut précaire) sont particulièrement visés mais au final, c’est l’ensemble de la classe ouvrière canadienne qui subira une pression à la baisse sur les salaires.

 De plus, le gouvernement en a profité pour abolir le système d’appel des décisions de la Commission de l’assurance-chômage, dont la plupart des intervenants reconnaissaient l’équité, la rapidité et l’accessibilité. Il sera dorénavant beaucoup plus difficile, spécialement pour un prestataire non-représenté, et surtout plus long de faire valoir ses droits. L’attaque aux droits économiques et sociaux que constitue l’introduction de la nouvelle définition « d’emploi convenable » se trouve ainsi renforcée par une attaque contre l’accès à la justice.

Le bon côté de la chose, si on nous permet l’expression, c’est que cette réforme a suscité un vaste mouvement d’opposition. Après une quinzaine d’années pendant lesquelles la question de l’assurance-chômage était pratiquement disparue du radar sur la scène politique canadienne, des centaines de milliers de travailleurs et travailleuses se sont mobilisés pour dire NON au saccage de l’assurance-chômage ! Il n’en tient qu’au mouvement ouvrier, aux groupes de chômeurs et chômeuses et à leurs alliés, de faire en sorte que cette mobilisation et cette colère débouchent enfin sur une réforme globale et la remise en place d’un régime qui garantira à « toute personne le droit à la protection contre le chômage », comme le veut la Déclaration universelle des droits de l’homme.

¹ Ce texte est une version modifiée par le MAC de Montréal d’un texte écrit par le MASSE et paru dans la brochure « Les sans-chemise se mobilisent ».